Adapter les activités de planification familiale à l’heure du COVID-19: le CRSD, un cas au Sénégal
par Wilma Mui, MPH, Gestionnaire de programme, World Faiths Development Dialogue
La pandémie de COVID-19 a posé défi après défi. Le monde du développement a dû changer et adapter ses approches de projet, ce qui a nécessité flexibilité, patience et innovation. Le Cadre des Religieux pour la Santé et le Développement (CRSD), une ONG basée au Sénégal, a été en mesure de poursuivre, avec quelques modifications, ses activités et son plaidoyer centrés sur la dissipation des idées fausses courantes, liées à la religion, qui persistent et constituent des obstacles importants à l’adoption du planning familial. Mais il a également assumé de nouvelles responsabilités avec beaucoup de dévouement et de créativité pour répondre aux besoins de la COVID-19.
Le CRSD est composé de chefs religieux représentant les différentes confréries soufies et les associations islamiques, ainsi que les églises catholique et luthérienne du Sénégal. Initialement établi en tant qu’association en 2014 centrée sur le dialogue et la collaboration, le CRSD est devenu une ONG agréée, établissant des partenariats avec l’UNFPA, le Ministère de la Santé et de l’Action sociale, et des ONG internationales, tous travaillant pour améliorer la santé maternelle et infantile au Sénégal, en abordant spécifiquement la planification familiale.
Lorsque la pandémie de la COVID-19 a changé le paysage en mars 2020, le CRSD a changé d’approche, adhérant aux directives et aux restrictions mises en place pour assurer la sécurité de la population. En collaboration avec le ministère de la Santé et son plan de contingence COVID-19, le CRSD a intégré des messages sur le virus dans ses activités, soit séparément, soit en association avec ses messages sur le planning familial. Le CRSD a réorienté une partie importante de ses activités de sensibilisation vers les médias (avec des restrictions sur les programmes présentiels).
Entre mars et septembre, le CRSD a :
- produit 2 vidéos sur le COVID-19
- produit 4 vidéos sur la religion, le COVID-19, la grossesse et le planning familial
- diffusé 39 spots télévisés
- participé à/présidé 96 émissions de radio
- est apparu dans 7 émissions de télévision sur la religion, la COVID-19 et la santé reproductive.
Le contenu était souvent en wolof et en arabe afin de toucher un public plus large. Les messages mettaient l’accent sur l’encouragement des femmes enceintes à aller chercher les soins prénataux. Sur la photo du haut, Arame Seck fournit des informations sur le COVID-19 et la planification familiale en wolof lors d’une émission de radio. (Crédit photo : CRSD)
« La religion peut jouer un rôle primordial dans le changement de comportement des populations. Les messages diffusés par les membres du CRSD dans les différents médias ont sans doute fortement atténué l’impact de la COVID-19 sur les populations surtout les femmes ». -Cheikh Saliou Mbacké, Président du CRSD (chef religieux musulman)
Avec l’incertitude entourant la COVID-19 au cours des premiers mois, ainsi que le souvenir de l’épidémie d’Ebola dans les pays voisins, les femmes et les familles hésitaient à se rendre dans les centres de santé. En collaboration avec les responsables de la santé, le CRSD a fourni des informations factuelles afin de dissiper les craintes et les idées fausses. Lorsque les règles de précaution se sont assouplies et que les voyages ont été autorisés, le CRSD a repris les formations et les activités en présentiel avec les chefs religieux, les prestataires de soins de santé et les bajenou gox (agents de santé communautaires respectés). Chacune de ces activités a fait l’objet d’un suivi médiatique, y compris l’engagement de journalistes locaux et des campagnes dans les réseaux sociaux.
Le CRSD a ainsi pu modifier son plan d’action pour tenir compte à la fois de nouveaux impératifs et d’incertitudes plus larges et persistantes. Les bases solides établies au cours des six dernières années lui ont permis de faire preuve de souplesse tout en continuant à sensibiliser les communautés au planning familial.
Les retours des chefs religieux ont été très positifs. Voici quelques déclarations de chefs religieux lors de visites de courtoise organisées par le CRSD, l’UNIFEM et la DSME apurés des grands chefs religieux du Sénégal pour les sensibiliser dans le contexte de la COVID-19:
« Vraiment, nous vous félicitons de cette initiative et nous vous soutenons et nous allons intégrer cette nouvelle dimension de l’utilisation des dispensaires par les femmes dans le contexte actuel de la COVID19 dans nos khoutbas et autres instances opportunes que nous dirigerons ». -Serigne Mansour Ka (chef religieux musulman)
« Toutes les religions révélées sont utiles pour les sociétés. Nous vous remercions de ce déplacement qui va dans le sens d’aider nos populations. Nous sommes très contents et vous encourageons. Nous parlerons davantage aux disciples. Que Dieu vous bénisse ». -Abbé Jacques Seck (chef religieux chrétien)
Pour l’avenir, le CRSD est en train d’élaborer un argumentaire axé sur la santé des adolescents, qui aborde un large éventail de questions ayant un impact sur les jeunes, notamment la santé mentale, la violence, la nutrition, les maladies sexuellement transmissibles, la grossesse chez les adolescentes et la santé menstruelle. En tant que partenaire du CRSD, le World Faiths Development Dialogue est fier de la croissance et de la capacité d’adaptation du CRSD. Alors que le monde continue de s’adapter à des réalités en constante évolution, le CRSD est bien placé pour poursuivre son plaidoyer en faveur du planning familial et relever des défis plus larges en matière de santé publique.
À propos de l’auteur : Wilma Mui, MPH est gestionnaire de programme au World Faiths Development Dialogue (WFDD) et soutient principalement le projet de WFDD sur la santé maternelle et infantile en Afrique de l’Ouest. Elle a servi en tant que volontaire du Peace Corps dans le sud du Sénégal de 2010 à 2013, travaillant avec les communautés locales sur une variété de sujets de santé. Avant de rejoindre l’équipe WFDD, Wilma a travaillé avec Grandmother Project au Sénégal en tant que consultante en santé communautaire et développement. Elle est titulaire d’un MPH en santé mondiale de l’Université Emory.